• Forum de Poésie. Postez vos poèmes, vos commentaires...
    Bienvenue à tous les poètes ! Forum de poésie, où tout le monde peut poster ses poèmes, mettre son avis sur les poèmes des autres et participer aux discussions !

Poème Médico drame

Peniculo

Maître poète
Inscrit
19 Octobre 2018
Messages
3,296
J'aime
5,853
Points
173
Age
85
Localité
Orléans
Je suis
Un homme
Hors ligne
#1
Médico drame



De l’acte médical dont l’utile secours
Se trouve retardé par les cardio-détours !


J’étais à l’agonie et vous n’en n'aviez cure
Les vacances négligent des autres les tracas,
Pour me venger j’écris un poème qui dure
Vous le lirez ou non je ne m’en soucie pas


Philosophiquement peut-on rire de tout ?
L’humour est un Janus, tout dépend de la face
Que le sort vous présente au gré du temps qui passe.
Le sourire par moment cesse d’être un atout.

Et pour mieux contrôler les humeurs de l’instant,
Homère de pacotille, à la rime morose,
Je m’en vais essayer de broder sur la chose.
Écrire est un moyen d’être, à tout, résistant.


L’iliaque et l’odyssée (Épopée coxalgique)

I
Il m’arrive d’encrer quelques papiers divers,
Les muses ayant, parfois, des sentiments pervers.
Laissent aller ma plume un peu à la dérive
Ou vengent le matheux qui de lettres se prive.
J’occupe ma retraite en de petits écrits
Que je fais sans talent vous m’en voyez contrit.
Or le destin venant me rendre coxalgique
Je rime par défi ma douleur organique
Et cherchant la césure en chambre hospitalière
Je transcris mon malheur sans excès de manière.
Voila donc le récit d’un boiteux rimailleur
Auquel la chirurgie offrira le bonheur

II
à septante ans et plus toujours tintinophile
Ma hanche, sottement, à droite se défile.
La gauche ayant subi sa restauration
Du chirurgien j’attends une même action.
Hélas la médecine aux amours admirables
Exige bien souvent de nombreux préalables
Et les raccommodeurs de boiteuse santé
Subissent les tracas de la complexité.
La prudence du temps veut un préliminaire
Avant, que chirurgie n’ait l’acte salutaire.
Comme il faut cependant sourire un peu de tout
Je vais vous disséquer l’histoire de bout en bout.

III
Tirons le premier fil de la situation
Où le trouble rejoint la complication
Et le problème étant quasi labyrinthique
Ne nous épuisons pas à chercher sa logique.
Le sablier du temps, granuleux préambule,
Fit un inconvénient qui me désarticule.
Car n’étant du destin qu’une boule mobile
Je le subis, restant quelque peu indocile.
Enfin, pour dire au mieux les soucis de la chose,
Il me sembla plus gai de déserter la prose.
Je ne vous conterai ni corbeau, ni renard,
Mais de ma hanche droite un grand besoin d’égard.

IV
La gauche, par l’action de l’art chirurgical,
Retrouva sa santé qui était au plus mal
Mais en préliminaire à la juste incision
On avait vérifié, du cœur, la précision.
En pratiquant un test à la dobutamine (1)
Qui avait confirmé que pompait ma machine,
Que l’effort s’obtenait lors d’un brin de systole
Suivi pour son repos d’un soupçon de diastole.
La chirurgie, ensuite, intervint sans retard,
Et ma hanche fragile, eut un nouveau départ.
Hélas ! L’autre, de droite, osa me mettre à mal
Clamant que je serai, à court terme, bancal.

V
Il eut été plaisant de livrer le combat,
Comme la hanche gauche l’avait mené, déjà,
Mais dans l’emploi du temps médical du moment
Il y avait hélas un fol encombrement.
Dobutamine n’avait pas de places vacantes.
Il fallait des techniques peu ou prou remplaçantes
Et la cardiologie en quête d’argument
Du scanner coronaire (2) avança l’agrément.
Le malade n’étant qu’âne non diplômé
Doit se laisser guider par dame faculté.
Et donc on me scanna oreillettes, ventricules,
Pour voir si mes canaux choyaient bien mes globules.

VI
Hélas, hélas, hélas, et quatre fois hélas
Du calcium avait laissé de vieilles traces
Le calcium blooming (3) si cher aux anglophiles,
Empêchait de juger mes coronaires agiles
Et l’ininterprétable, avec un grand culot,
Dit :je ne vois que goutte en vos cardio-tuyaux.
Il est vrai qu’à mon âge, et d’un stent porteur
Depuis plus de vingt ans, on pouvait avoir peur
Que ce maudit calcium qui écrit au tableau
S’en vienne perturber du cœur les vidéos.
Dans un élan final dame cardiologie
Se mit à suggérer « coronarographie » (4)

VII
Me voila derechef sur la table où l’on voit
Dedans mes coronaires une nouvelle fois.
Le temps est à l’été et la salle est si fraîche
Que l’on y gèlerait les noyaux d’une pêche.
Mais je pensais : enfin on va pouvoir me dire
Si, par le biais du cœur, le mal de hanche expire.
Or, je ne sais quel Dieu ennuyant Esculape
Rien ne fut terminé ! Ce n’était qu’une étape.
Car deux humbles sténoses ornant les pellicules
Montraient maux anodins ou troubles majuscules.
Et quelques lésions non significatives
Étaient soit négligeables, soit choses maladives

VIII
Une dame logique au rationnel discours,
Avança un avis offrant nouveaux recours
«Faudra-t-il faire un test à la dobutamine.
Molécule disant l’excès de calamine ? »
Si tout se passe bien, une hanche nouvelle
Opérée promptement danse la tarentelle,
Si les sténoses avouent qu’elles sont des dangers
Il faut les dilater avant hanche changer.
Et voila donc pourquoi je dois encore attendre
Dobutamine ou bien coronaires à distendre !
Le temps est un grand maître a-t-on dit bien souvent
Mais il tue ses élèves c’est très démotivant !

IX
De la réflexion jaillissait la lumière
On pesa l’embarras de la juste manière.
Du dobu (1) ignoré on oublia le cours
Les sténoses pouvant couver de sales tours.
Une date à venir dirait quand on m’explore
Et si mon myocarde de stents (5) se décore.
Ou bien, si dilatant mes rétrécissements,
On fait mon palpitant s’irriguer librement.
Mais il faudra trois mois après ces bons travaux
Pour que hanche bistouri se rencontrent à nouveau.
Et qu’on me dise enfin : on y va sans tarder
L’ennui cardiologique a trop fait retarder.

X
Ma hanche dépendant du planning médical,
Ce mal persévérant me mine le moral.
Et mon ressentiment de la difficulté
Doit s’accorder, contraint, avec la faculté.
Il me reste à attendre un nouveau rendez-vous
Qui rationnellement m’en ferait voir le bout.
Car dans mes coronaires où dorment les sténoses
Une dilatation préviendrait les cyanoses.
Puis j’attendrai trois mois privé de gymnastique :
Le myocarde sain, mais toujours coxalgique.
Enfin viendra le jour où la cause première
Verra du chirurgien l’efficace manière

XI
Donc on a décidé de lorgner en détails
Les tuyaux ce mon cœur ainsi que leurs portails
Car dans les étroitesses, aux rives restrictives,
On mettra des outils aux œuvres décisives
Et gonflant des ballons tels des enfants en fête
On ouvrira l’étroit qui aux soucis s’apprête.
Coronarographie est chose touristique
Par l’artère on parvient au but myocardique
Et pour mieux repérer les déformations
On filmera du cœur les imperfections.
Et juste après juillet l’assaut cardiologique
M’obligea à trois mois d’attente coxalgique.

XII
Me revoilà au frais ayant un œil magique
Qui de mes coronaires contemple l’esthétique
Passant par une artère on glissa l’espion
Qui allait décider de mes dilatations
Et comme mes virages se trouvaient encombrés
De trois ressorts subtils ils furent recalibrés.
Puis un traitement neuf à l’ancien s’ajouta
Afin que mes plaquettes de s’agglomèrent en tas
Censé être plus neuf mon néo myocarde
Ne va plus tolérer que ma hanche s’attarde,
Bien qu’il faille du temps pour que je récupère
Le mal qui persiste à la fin exaspère.

XIII
À moins que, d’ici là, quelques soucis nouveaux
Osent d’un spécialiste exiger des travaux,
Il serait sympathique, avant que je décède,
Que l’on traitât ma hanche avant qu’elle ne cède.
J’aurais été un cas d’une urgence notable
Auquel on imposa un bien long préalable ?
Car la dernière marche en l’étrange escabeau,
Eut pu été gravie, alors, un peu plus tôt ?
En conservant le but dans le viseur logique,
on eut pu avancer l’examen coxalgique
Afin que disposant du contrôle idéal
L’anesthésiste dise : endormons l’animal.

XIV
Je me demande si l’accident majuscule
Eut permis l’action sans trop de préambule.
Et si la médecine apte à bien des miracles
Par un excès d’acteurs n’affadit les spectacles.
La médico-saga m’étonne voila tout
Si le malade a mal, quand en voit-il le bout ?
Un lettré vous dira «ces chose là sont rudes
Il faut pour les comprendre avoir fait des études » (6)
« La parfaite raison fuit toute extrémité
Et veut que l’on soit sage avec sobriété. » (7)
Mais le cardio-UBU qui me désorganise
Laisse voir un système où logique agonise.

XV
On me rétorquera que la santé sature
Que ses praticiens sont victimes d’usure
Et que certains fâcheux n’avaient pas vu venir
Le manque d’Asclépios qui allait survenir.
Car le temps de l’humain étant plus long à vivre
Il fallait bien aider le grand âge à survivre.
Gardons aux médecins leur esprit de logique
Leur art doit il subir la sotte politique ?
Et redoutons d’avoir, dans un monde futur
La faculté lumière aux ordres de l’obscur.
Faudra-t-il que se lève un Éole pamphlétaire
Pour qu’’Hygie s’harmonise au juste nécessaire ?

(1) Dobutamine : test d’effort par injection d’un accélérateur cardiaque quand l’exercice physique n’est pas possible.

(2) Coro-scanner ou scanner coronaire : examen permettant de visualiser les artères coronaires par injection intraveineuse d’un opacifiant iodé et contrôle photographique, tridimensionnel, de leur état.

(3) Calcium blooming : opacification des images par le calcium déposé sur les parois des coronaires rendant l’examen souvent non interprétable.

(4) Coronarographie : technique d'imagerie médicale pour visualiser les artères coronaires en cas de suspicion de maladie coronarienne. Examen médical invasif utilisant les rayons X et l'injection intra artérielle d'un produit de contraste iodé.

(5) Stent : dispositif, le plus souvent métallique, maillé et tubulaire, glissé dans une cavité naturelle humaine (artère coronaire par exemple) pour la maintenir ouverte. (6) Victor Hugo « Les Pauvres gens »

(7) Molière « Le Misanthrope »

 

Moïse Wolff

Modérateur
Membre du personnel
Inscrit
29 Octobre 2018
Messages
9,721
J'aime
16,933
Points
450
Je suis
Un homme
Hors ligne
#2
Je vous ai lu jusqu'au bout, quand le vin est versé et plaisant au palais) on le déguste.
Le corps, ce vaisseau terrestre abrite chez vous un esprit aiguisé, on a du mal à imaginer qu'un tel organe puisse un jour (faute de contrôle technique satisfaisant) disparaitre de la circulation. Sachez que je compatis à vos déboires, quand la mécanique s'use il faut un bon réparateur, de ceux animés par la passion
des belles choses, hélas la médecine a aussi ses limites surtout par les temps qui courent,
Les patients meurent désormais dans les couloirs sur des brancards, faute d'être pris en charge à temps.
Quoi qu'il en soit, et si cela peut vous rassurer, votre esprit quant à lui, continuera sa course tel ce papillon issu de la chrysalide (le corps je m'entends) vous ne le saviez sans doute pas vraiment
mais vous êtes immortel, à ce sujet, j'ai rencontré un défunt ami alors que je dormais (je rêvais) nous étions alors en conversation (toujours dans mon sommeil) c'est intéressant et véridique surtout, il me confiait qu'il ne comprenait pas ce qui lui arrivait, je lui déclarais qu'il était mort de son physique, il me répondit qu'il ne le savait pas et que cela expliquait bien des choses, n'est-ce pas remarquable ?
 
Dernière édition:

Phantom

Poète confirmé
Inscrit
2 Novembre 2018
Messages
90
J'aime
81
Points
168
Localité
Paris
Je suis
Un homme
Hors ligne
#3
Vos déboires navrants, mon cher Peniculo,
N’ont rien de surprenant en ces temps fort troublés :
Logique et empathie manquent dans les chambrées
Et les salles d’attente en nos tristes hostos.

Comme vous l’écrirait votre cher vieux copain
Le capitaine Haddock, philosophe et marin,
Notre l’hôpital public est devenu un souk :
Ces médicastres sont tous des bachi-bouzouks !

Bon courage, avec tous mes vœux de rétablissement :)
 

Membres en ligne

Aucun membre en ligne actuellement.
Haut